Des interactions rares mais très spécifiques façonnent la structure de l'ADN

L'organisation de l'ADN dans l'espace tridimensionnel du noyau cellulaire détermine la régulation de la plupart des activités cellulaires. Depuis quelques années, un nouveau niveau d'organisation a été découvert et son rôle dans différentes pathologies a confirmé son importance critique. Ce niveau d'organisation découle de l'interaction préférentielle entre certaines parties de l'ADN et de l'exclusion des autres. Les mécanismes qui régissent l'assemblage de ces structures étaient encore peu compris.

Dans cet étude nous avons marqué des dizaines de régions spécifiques de l'ADN et quantifié leur fréquence d'interaction en utilisant la microscopie tridimensionnelle de super-résolution. Nous avons étudié des centaines de cellules embryonnaires de drosophile dans différents états de développement et constaté que la fréquence de chacun de ces contacts change en fonction du type de cellule et de son état métabolique. Suite à ce résultat, nous avons évalué si ces changements dans la fréquence d'interaction se reflétaient à une plus grande échelle d'organisation de l'ADN en étiquetant des marqueurs épigénétiques d'ADN actif et inactif avec des molécules fluorescentes.

En analysant des molécules uniques, nous avons mis en évidence que l'ADN forme des nano-compartiments de caractéristiques distinctes selon que la chromatine est active ou inactive et que le nombre et la taille de ces compartiments changent entre différents types cellulaires. Ces résultats confirment la relation étroite entre les différents niveaux d'organisation de l'ADN. Ils montrent que la régulation de la fréquence d'interaction entre régions spécifiques joue un rôle clé dans l'organisation de la chromatine à plusieurs échelles. D'autres études pourraient révéler comment des modifications de ces interactions pourraient créer des manifestations pathologiques dans la cellule et affecter également le développement d'un organisme complet au cours de l'embryogenèse.

Ces travaux ont été récemment mis en valeur dans une revue dans Nature Communications (Nature Communications, doi:10.1038/s41467-017-01962-x).

Approche biochimique de la maladie de Huntington et des pathologies liées aux poly-glutamines

La maladie de Huntington (HD) est une maladie neurodégénérative héréditaire qui se caractérise par des mouvements involontaires, une déficience motrice générale, des troubles psychiatriques et la démence. Les bases moléculaires de la HD ont fait l'objet d'études depuis le début des années 1990, lorsque le gène causal et son expansion tri-nucléotidique ont été découverts. Les mutations dans le gène transcrit, la protéine huntingtine (htt), conduit à des expansions de poly glutamine (poly Q) à l'extrémité N-terminale. En effet les segments de poly Q ayant plus de 35 répétitions deviennent pathogéniques.

Même si htt a fait l'objet de nombreuses études, sa caractérisation à résolution atomique est compromise car htt est sujette à l'agrégation. De plus, la partie N-terminale logeant la mutation n'adopte pas de structure globulaire, ceci empêche d'une part des études de cristallisation aux rayons X et d'autre part l'analyse des données RMN car la répétition des poly Q est mal résolue dans les spectres. Pour surmonter les limitations actuelles de l'analyse des poly Q, nous avons combiné la « non-sense suppression » et l'expression de la protéine en « cell free » afin de marquer de manière spécifique une seule glutamine dans htt. Nous avons pu effectuer des expériences de RMN pour obtenir des spectres contenant le signal d'une seule glutamine, ce qui nous a permis de mesurer avec précision les déplacements chimiques du squelette peptidique et de la chaîne latérale de chaque glutamine les unes après les autres. L'analyse finale permet de mettre en évidence les éléments de structure secondaires qui apparaissent le long de la séquence poly Q. Notre analyse de htt indique que les 17 résidus N-terminaux ont une forte propension à l'hélicité qui croît à l'approche du segment de poly Q. Cette propension diminue ensuite le long du segment poly Q et les résidus en aval, y compris deux poly P, montrent une tendance plus prononcée à une structuration étendue, qui est très probablement due à un enrichissement en conformation de type poly-proline-II.

Avec cette méthodologie, nous pouvons maintenant mesurer d'autres observables RMN tels que les couplages dipolaires résiduels, les vitesses de relaxation et l'augmentation de la relaxation paramagnétique qui peuvent être utilisées pour caractériser la propension conformationnelle locale, la coopérativité structurale et les interactions intramoléculaires dans les régions poly Q. Ceci ouvre la voie à la compréhension des bases structurales de l'espèce pathologique de htt et de la présence présumée d'une sous-population de conformères toxiques restée spéculative jusqu'à ce point.

A. Urbanek, A. Morato, F. Allemand, E. Delaforge, A. Fournet, M. Popovic, S. Delbecq, N. Sibille, P. Bernado, Angew. Chem. Int. Ed. Engl. 2018, DOI 10.1002/anie.201711530.

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Une nouvelle méthode ouvre la voie à l’étude des protéines à séquence répétée

Certaines pathologies – c'est notamment le cas de la maladie de Huntington - sont causées par des protéines présentant un nombre anormalement élevé de répétitions d'un même acide aminéacide aminé. La structure protéique adoptée au niveau de ces répétitions est désordonnée et non accessible aux outils d'analyse actuels. Mais à Montpellier, l'équipe de Pau Bernadó vient de mettre au point une nouvelle méthodologie permettant de s'affranchir de cette limite. Ce travail ouvre la voie à une meilleure compréhension de la maladie de Huntington, mais également à l'étude d'autres maladies héréditaires associées à ce type de phénomène.

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Apprendre aux bactéries à reconnaître de nouvelles molécules

Les microbes présentent un fort potentiel d'applications dans plusieurs domaines de notre vie quotidienne tels que la surveillance environnementale, le diagnostic ou les thérapies ciblant le microbiote. Cependant, ces applications requièrent que les microbes reconnaissent et répondent à de multiples signaux tels que des biomarqueurs de maladies ou des polluants environnementaux.

Dans ces travaux, les membres du groupe de biologie synthétique du CBS ont développé une méthode pour construire des récepteurs synthétiques permettant aux bactéries de répondre à de nouveaux ligands. Ces récepteurs synthétiques sont composés de: 1) un anticorps de camélidé (VHH) pouvant être modifié pour reconnaître de nombreuses cibles et 2) des facteurs de transcription bactériens contrôlant le comportement des bactéries.

Une fois les récepteurs synthétiques activés par liaison du ligand, ils contrôlent l'expression des gènes bactériens. Nous avons développé une méthode pour optimiser la performance du récepteur en ajustant finement ses niveaux d'expression et en optimisant les séquences de liaison entre ses différents domaines. Enfin, nous avons montré que ces récepteurs peuvent être connectés à des circuits génétiques synthétiques permettant un traitement supplémentaire du signal en aval. Le principe général de cette plateforme couplé à la polyvalence de la détection par anticorps devrait permettre le déploiement de ces récepteurs dans divers hôtes pour détecter des ligands pour lesquels aucun récepteur n'existe dans la nature.

Pour plus de détails, voir notre dernière publication dans ACS synthetic biology:
"A Modular Receptor Platform To Expand the Sensing Repertoire of Bacteria".
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28946740

Le CBS fête ses 25 ans !

Le CBS célèbrera le vingt-cinquième anniversaire de sa création les 24 et 25 Mai 2018. Les recherches qui y sont menées depuis 25 ans seront évoquées au travers de présentations de scientifiques de renom international, de collaborateurs et d'anciens membres du CBS, ainsi que par des interventions flashs de doctorants et post-doctorants. Au cours de la première demi-journée sera aussi rendu un hommage à Michel Kochoyan, ancien Directeur du CBS.

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